Ennéagramme : quels discernements ?
L’ennéagramme est à la mode : les livres abondent, les sessions se multiplient, un nombre croissant de personnes s’intéressent à cette démarche de connaissance de soi et de développement personnel… Pourtant des maladresses d’emploi ou des contre-indications de la démarche peuvent inquiéter à juste titre. Elles doivent être analysées avec les critères usuels de discernement des méthodes pédagogiques et des pratiques de développement personnel, sans oublier de situer la philosophie de l’homme (“anthropologie”) sous-jacente.
L’ennéagramme échappe d’autant moins aux questions posées par l’usage des méthodes psychologiques ou thérapeutiques qu’il s’inscrit, pour certains, dans une démarche de type New Age voire, dans quelques cas, résolument ésotériques, dans une vision réductrice de la personne et de sa liberté.
En outre, l’usage de l’ennéagramme par des groupes sectaires contribue à jeter un discrédit sur cette méthode. (C’est dans ce contexte que l‘UNADFI (Union Nationale des Associations de Défense des Familles et de l’Individu Victimes de Sectes) met en garde contre l’usage de l’ennéagramme.)
Une question actuelle
Dès sa création, l’IEDH a inscrit l’ennéagramme parmi les méthodes de connaissance de soi et de développement personnel nécessaires aux formateurs et susceptibles d’être proposées dans des stages, notamment pour les particuliers. En effet, la finesse d’investigation qu’il permet, la prise en compte des différents plans de la personnalité et la puissance de la transformation qu’il induit font de l’ennéagramme une démarche efficace et féconde.
L’impact de l’ennéagramme suscite des questions et des inquiétudes qui rejoignent les critiques, bien connues, suscitées par l’usage des méthodes de développement personnel en général. C’est pourquoi, dès 2001, l’IEDH a formalisé sa déontologie et ses critères de discernement, publiés sous la forme de 10 points de repères (ci-dessous).
Nos points de repères :
1/ Si l’origine de l’ennéagramme comme figure symbolique et mnémotechnique semble se perdre dans la nuit des temps, (voir historique), la méthode proposée aujourd’hui sous ce nom à travers des livres et des formations a été développée au milieu du XXème siècle. Elle est clairement attribuable à des auteurs comme Oscar Ichazo, Claudio Naranjo, Helen Palmer, Bob Ochs,… et leurs successeurs.
2/ En tant que méthode globale, l’ennéagramme est analysable et évaluable sur sa pertinence et son efficacité tant au plan conceptuel que pratique (mais les évaluations en langue française sont encore trop peu nombreuses[1]).
3/ En tant que guide de description et de connaissance de soi, et sans les ajouts philosophiques ou spirituels que certains lui apportent, il est compatible avec une anthropologie chrétienne[2].
4/ En particulier, en situant la “blessure” par rapport à un “don”, il est à la fois :
- outil de thérapeutique (travail de mémoire sur un passé, permettant de lever des méconnaissances),
- aide à une dynamique de développement (ouverture sur une perspective de changement, découvrant des portes).
5/ Pour autant, l’ennéagramme, qui permet diagnostic et balisage, ne contient pas, en lui-même, les outils de développement personnel nécessaires au cheminement ultérieur.
6/ En outre sa découverte nécessite un accompagnement par un formateur sérieux, en groupe ou individuellement. (Se borner à la lecture d’un livre quel qu’il soit est, au mieux, insuffisant, au pire, dangereux).
7/ La puissance d’investigation de l’ennéagramme et les objets mêmes (“compulsion”) du travail qu’il permet, font que cette méthode présente des risques pour des personnalités encore trop peu structurées ou psychiquement fragiles ; nous recommandons un âge minimal d’accès, non à la connaissance conceptuelle de l’approche, mais à son emploi dans un cadre institutionnel. Un entretien préalable permet de situer la demande et de valider l’indication.
8/ Cette puissance peut entraîner une fascination excessive. Aussi est-il préférable de proposer au partenaire peu familiarisé avec l’introspection une première découverte de soi à partir d’outils plus simples et plus classiques (caractérologie, bases de l’Analyse Transactionnelles, assertivité, éléments de PNL,…) et, si possible, en s’appuyant sur une approche anthropologique solide.
9/ La progressivité de la découverte impose qu’on respecte le rythme du participant et, en particulier, qu’on ne lui annonce jamais sa base présumée, ce qui a pour corollaire :
- qu’on ne corrige pas la base qu’il déclare, même si cela semble une erreur ou une illusion (à lui d’en faire la découverte) ;
- qu’on s’abstient d’utiliser les numéros des bases dans la conversation courante, hors séance de travail ;
- qu’on ne type pas à distance (des personnes dans un groupe, des personnes connues mais absentes,…)
10/ Enfin, toutes les précautions usuelles quant à la déontologie du formateur sont évidemment de rigueur : liberté de choix, respect de la liberté de la personne, discrétion, distance juste, professionnalisme, supervision du formateur, …
En résumé : l’ennéagramme est, pour nous, une méthode contemporaine, parmi d’autres, à utiliser avec doigté et discernement !
Voir: Présentation / Historique